Le Devoir, samedi 19 et dimanche 20 octobre 2013
SERGE TRUFFAUT
Montréal, Québec
Il aura fallu 17 ans (!), de courage et de patience, avant que Steven Morris achève la réalisation d’un documentaire consacré au pianiste, chanteur et compositeur de R&B le plus sous-estimé qui soit : Harry Vann Walls. Dix-sept ans de travaux forcés pour rendre hommage à celui qui a fait la fortune, au propre comme au figuré, d’une ribambelle d’artistes et surtout de dirigeants de labels.
Grâce à ce film présenté cette semaine dans le cadre du Festival du nouveau cinéma (FNC), on apprend ou réapprend un fait d’une importance capitale dans l’évolution de la musique populaire américaine : Vann Walls fut, dans les années 50, le pianiste à résidence de l’étiquette Atlantic, fameuse pour avoir produit Ray Charles, Aretha Franklin, The Modern Jazz Quartet, Charles Mingus et autres clochards célestes du jazz et du blues.
À ce titre, Vann Walls a donc ponctué les chants de Big Joe Turner, Lavern Baker, Ruth Brown, etc. Devant la caméra de Morris, cette dernière livre un témoignage qui force la méditation comme l’admiration, car elle détaille comment Vann Walls et elles ont été escroqués dans toutes les largeurs par les croque-morts de l’art musical.
Cela souligné, Morris a réussi le prodige suivant : il a convaincu Ry Cooder, Ahmet Ertegun, fondateur d’Atlantic, Jerry Wexler et surtout Dr John, qui fut l’élève de Vann Walls, de confier ce que le monde musical doit à ce pianiste qui a passé les 30 dernières années de sa vie à Montréal. Ce film étant un incontournable, espérons qu’un distributeur se manifestera.
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